
« Des méthodes d’un autre temps », « une dénégation du droit à la défense au travail », « un non-respect de la présomption d’innocence », « une violence psychosociale », « un climat de peur »… Les termes sont forts. Yann Le Baron de l’Union nationale des syndicats autonomes (Unsa) Pontoise, Karine Chatenay, du syndicat autonome et de l‘union fédérale des autonomes de santé (Ufas) et Maryline Bureau, expert pour l‘Ufas, n‘y vont pas avec le dos de la cuillère lorsqu‘ils s‘insurgent contre les procédures disciplinaires opérées par la direction du centre hospitalier René-Dubos. « La forme est tout à fait légale, précise Yann Le Baron, mais ce qui nous choque, c’est la manière dont des familles entières de membres du personnel peuvent être plongées dans la douleur et la précarité du jour au lendemain sur de simples accusations, sans que nous, syndicats et avocats de la défense, ne puissions faire quoi que ce soit face à autant de détresse ! »
68 kg de denrées…
S‘ils sont tellement furieux, c‘est parce qu‘un agent de service hospitalier qualifié de Pontoise, un Pontoisien âgé de 26 ans, est menacé d‘exclusion car suspecté d‘avoir dérobé 68 kg de denrées alimentaires. « L’accusation s’appuie sur un inventaire et un enregistrement vidéo d’une trentaine de secondes, sur lequel on voit l’agent et l’un de ses collègues sortir d’un bâtiment avec chacun un sac à la main. Et c’est tout ! », s‘étonne Maryline Bureau. « Le problème, c’est que si la soi-disant enquête n’était toujours pas achevée le 31 mars dernier, les deux personnes ont d’ores et déjà fait l’objet d’une suspension rémunérée depuis le 9 janvier. Et évidemment, les 3 700 agents de l’hôpital étaient tous au courant par le bouche-à-oreille… Résultat : l’un d’eux, un gaillard habituellement très fort, s’est retrouvé plusieurs fois aux urgences », surenchérit Karine Chatenay.

… Dans deux sacs !
Convoqué devant le conseil de discipline de l‘établissement public, présidé par Gérard Seimbille, 1er adjoint au maire de Pontoise, le jeune homme s‘est expliqué. « Ce n’était pas des aliments, mais les tenues de pompiers volontaires de mon collègue. Comme nous rentrions ensemble, je l’aidais à les porter. J’ai juré au conseil que c’était la vérité », confie le garçon visiblement dévasté. « Contractuel depuis quatre ans, j’ai enchaîné de nombreux contrats, d’un mois, de deux, de six mois et dernièrement d’un an. Je me suis accroché dans la perspective d’évoluer pour devenir aide-soignant un jour », ajoute-t-il. « Nous avons acheté les denrées qu’on le suspecte d’avoir dérobé : 25 kg de frites, un bidon de trois kilos de ketchup, huit bouteilles de cola, huit ananas et 300 gâteaux frais. Il est évidemment impossible de faire rentrer le tout dans deux malheureux sacs », insiste Yann Le Baron. « Ses états de service impeccables et l’attestation de sa bonne moralité signée par l’ensemble de son service ne semblent servir à rien », s’étonne le syndicaliste.
Décision à venir
Avec quatre voix favorables à une sanction et autant contre, le conseil de discipline ne s‘est pas vraiment prononcé sur le cas du jeune Pontoisien. Son avenir professionnel repose donc désormais dans les mains d‘Alexandre Aubert, le directeur de l’hôpital René-Dubos. « Le deuxième agent suspendu demeure sans nouvelles quant à son « procès ». Et un troisième individu sous le régime d’un contrat aidé emploi d’avenir, a qui on a reproché d’avoir emmené les deux premiers dans sa voiture le jour du soi-disant vol, a quant à lui été remercié », conclut Yann Le Baron.