
« Nous sommes une association culturelle, pas cultuelle (religieuse, NDLR) ! », insiste M’Hamed Ait Khouya, le président d’Espaces et lumières. Son association a fait l’objet d’interrogations formulées par le groupe d’opposition Pontoise à cœur, lors de la séance de questions orales du conseil municipal de Pontoise du 26 janvier. Après la fermeture récente, par la préfecture, d’une salle de prière aménagée en sous-sol du foyer de travailleurs migrants du quartier Saint-Martin, la tension semble, en effet, avoir montée d’un cran. « Y-a t-il d’autres salles du même type sur le territoire de la commune ? (…) Nous restons particulièrement vigilants quant à la situation de l’association Espaces et lumières financée par la ville, dont les activités ne nous semblent pas exemptes de prosélytisme », ont déclaré le deux conseillers municipaux Annick Ferré et Patrick Morcello, du groupe d’opposition Pontoise à cœur, lors de la séance de questions orales. Concrètement, ils soupçonnent le collectif d’imposer son point de vue auprès de ses adhérents avec un certain zèle.
« Accusation grave ! »
Prosélytisme : « Un terme fort pour une suspicion grave, pourtant dénuée de la moindre preuve »,pour le député-maire (LR) Philippe Houillon, qui a toutefois rassuré l’auditoire en indiquant que la Ville et les services de police gardaient un œil sur les activités du collectif. « La ville de Pontoise ne finance pas l’association Espaces et lumières, elle lui a simplement attribué une subvention », a précisé l’élu. « C’est effectivement très grave de tenir ce genre de propos ! Nous ne sommes pas une secte, nous sommes des bénévoles et nous proposons du soutien scolaire, tous les soirs à partir de 17h30, des cours d’arabe, pour enfants et adultes, et nous organisons des groupes de paroles et autres actions de soutien, généralement sur le thème de la parentalité, ouverts à tous ceux qui le souhaitent, quelle que soit leur origine ethnique et leur religion », explique M’Hamed Ait Khya. Ce technicien logistique de formation, est l’un des membres fondateurs de cette association installée place Joseph-de-Guignes, dans le quartier des Louvrais.
Laïcs et mixtes
« Je ne suis ni croyante ni étrangère, et je peux garantir le fait que nos enseignements sont bien laïcs, avec des ouvrages certifiés par le label Cadre européen commun de référence pour les langues », ajoute Gisèle Baron, la secrétaire de l’association qui a rejoint l’équipe d’Espaces et lumières en octobre dernier. Mercredi dernier, dans le local de l’association mis à disposition par l’association pour les équipements sociaux (APES), deux salles de classes aménagées au sous-sol d’un immeuble, une douzaine de jeunes élèves, filles et garçons, reprenaient en chœur les comptines chantées par leurs deux professeurs rémunérées par Espaces et lumières.
« Et autofinancés »
« La mairie nous verse une petite subvention, certes, et met à notre disposition deux salles de réunion à la maison de quartier voisine, mais nos cours d’arabes sont autofinancés. Les cotisations annuelles supplémentaires pour participer à ces derniers, compris entre 220 et 240 euros à l’année selon le niveau, couvrent largement nos frais, voire une bonne partie du reste de nos dépenses, comme le prouvent les deux contrôles initiés par la préfecture, en 2015 et 2016 », note, par ailleurs, M’Hamed Ait Khouya. « Nous préférons jouer la transparence et accueillir les personnes perplexes quant à nos activités, sachant qu’elles sont ouvertes à tous, plutôt que contre-attaquer, par la voie judiciaire, sur les accusations diffamatoires du groupe Pontoise à cœur, ce que nous n’excluons pas pour autant », conclut-il.

« Contre l’échec scolaire et pour le vivre ensemble »
« Si je suis né au Maroc, mon pays c’est la France, qui m’a naturalisé en 2009. Et si je donne autant de mon temps bénévolement, c’est pour justement faciliter l’intégration d’une population étrangère ! Nous luttons contre l’échec scolaire, nous promulguons les échanges culturels et le vivre ensemble, nous tentons de renforcer le rôle de la famille ! Nous constituons, en quelque sorte, un lien entre l’école et une population en difficulté, éloignée, pour des raisons diverses, des services publics », proteste M’Hamed Ait Khouya. « Les cours relèvent d’une demande des familles qui retournent dans leur pays d’origine l’été et qui en ont assez d’essuyer des remarques désobligeantes car leurs enfants ne parlent pas arabe. J’ai déjà enseigné à la mosquée de Pontoise, avant qu’elle ne crée son institut, mais j’ai préféré stopper ma collaboration après un désaccord, justement au sujet de la mixité dans les salles de cours ! », sourit-t-il.