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Mystère à Allineuc et La Prénessaye (Côtes-d'Armor) autour de la mort inexpliquée de 300 vaches

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Stéphane Le Béchec au milieu de ses vaches, au premier plan une bête gravement atteinte de pelade

Stéphane Le Béchec au milieu de ses vaches, au premier plan une bête gravement atteinte de pelade

Sur son téléphone portable, Stéphane Le Béchec, éleveur à La Ferrière en Allineuc, près de Loudéac, a conserve les clichés de ses bêtes mortes. Il y en a 170. Des photos dures à voir.

Certaines vaches sont tombées raides, la bouche pleine, pendant qu’elles mangeaient. Une autre, l’œil pâle, victime d’un AVC, a vomi juste avant de trépasser. Or, les vaches ne peuvent pas vomir, normalement…

Au nombre anormal de décès subi par le troupeau s’ajoutent des comportements anormaux que personne ne sait expliquer.

« J’ai pris deux chiens ; ils se sont enfuis loin de la ferme. Par moments, les vaches deviennent folles et forcent les clôtures pour s’éloigner de la ferme, alors que leur comportement normal serait d’aller chercher leurs veaux. C’est épouvantable comme situation ».

Injustice

Épouvantable, et injuste. En effet, Stéphane Le Béchec affirme que loin d’avoir été entendu par les services sanitaires, on a essayé de le faire passer pour un mauvais éleveur, voire un homme qui maltraiterait ses bêtes…

Une accusation qui, on le sait, est particulièrement violente pour une profession où l’animal est le centre de la vie, mais qui semble devoir être balayée par les faits.

Problème électrique

Stéphane Le Béchec a une certitude. Pour lui, l’origine des maux qui frappe son troupeau est liée à l’électricité et aux équipements qui existent aux alentours de sa ferme.

Les relevés qu’il a effectués montrent l’existence de plusieurs points où le courant électrique dans le sol s’élève à 3 volts. Pour lui c’est lié à une ligne haute tension qui jouxte son pré, mais aussi à une antenne relais de téléphonie mobile, la 4G, ainsi que l’incidence d’une structure éolienne. Pour Stéphane Le Béchec, ces perturbations sont exacerbées par l’existence de failles dans son terrain, qui captent ces courants électriques.

Plus de migrateurs, ni d’escargots… Et les boussoles perdent le Nord !

Assurément, il se passe quelque chose dont l’éleveur ne saurait être tenu pour responsable. Les boussoles perdent le Nord magnétique ; les oiseaux migrateurs, les buses et autres rapaces ont cessé d’y venir, ainsi que les rongeurs… On ne rencontre même plus d’escargots, de limaces ou de batraciens sur le site.

Les faits

Stéphane Le Béchec s’est installé à cet endroit en janvier 2016

« Dès le mois de février j’ai remarqué un comportement anormal de mon troupeau ».

L’éleveur en informe le vétérinaire sans que ce dernier ne s’en émeuve outre mesure. En juillet, le rythme des mortalités des bêtes s’est accéléré et la production laitière a chuté fortement. Le troupeau va  de mal en pis. Au mois d’août 2016, les vaches cessent de boire et ne se couchent presque plus.

Un vétérinaire remplaçant l’enjoint de faire venir le Groupement de Défense Sanitaire pour une table ronde sur l’exploitation.

Pour autant, malgré déjà 36 décès de bovins à l’époque, le GDS ne relève rien d’anormal. En octobre, par contre, il constate que 15 vaches ont une température corporelle près de deux degrés en dessous de la normale, sans explication.

Réponses sans solution

Un audit réalisé par l’école vétérinaire de Nantes préconise d’améliorer les rations alimentaires. Le nutritionniste de la chambre d’agriculture confirme que la ration peut être améliorée, mais reconnaît qu’en aucun cas ce ne peut être la cause de la mortalité. Ni de la baisse de la production laitière. Encore moins de l’état corporel du cheptel.

Par ailleurs, pour Stéphane Le Béchec, s’il y avait eu carence alimentaire il n’aurait pas eu de vêlages espacés de 10 mois. Pour autant la souffrance de ses bêtes l’accable ; le désespère.

Du lait impropre à la consommation

Les vachent perdent leurs poils...

Des vaches qui perdent leurs poils… (©Le Courrier indépendant)

En effet, les vaches souffrent, et c’est visible : pelades, diarrhées, infection urinaire qui touche tout le troupeau, œdèmes aux mamelles, etc.

La mortalité des veaux est alarmante, d’autant que, régulièrement, ils refusent de téter leur mère. Pour l’éleveur le lait de ses vaches est devenu toxique. Il a décidé de ne plus le laisser partir dans le circuit commercial. Dernièrement, les veaux qu’il a envoyés à l’abattoir ont été saisis après abattage : la viande ne séchait pas !

Tout cela entraîne une situation dramatique pour Stéphane Le Béchec qui n’arrive plus à payer ses factures. Électricité et eau sont coupés.

Des idées noires le hantent.

Si ça n’avait pas réagi dans la presse, je me foutais en l’air !

La santé de l’éleveur aussi se dégrade…

Une prim'Holstein dans un bien triste état...

Une prim’Holstein dans un bien triste état… (©Le Courrier indépendant)

L’investissement de 500 000 € pour la ferme vire au cauchemar, et au-delà de la santé de sa ferme, c’est bien l’intégrité physique du paysan qui est désormais remise en cause.

Sa santé se dégrade, il déclare être en dessous des 37 °C, et se plaint d’être devenu électrosensible :

Désormais je sens les courants électriques et les ondes électromagnétiques. Quand je mets les mains dans l’eau, ça me fait des crampes aux mains, ce n’est pas normal. 

L’an passé Stéphane Le Béchec est victime d’un incident cardiaque. Sur sa ferme comme dans sa vie, tout semble partir à vau-l’eau.

Je ne suis pas seul dans ce cas. Beaucoup de gens sont malades autour de moi, il y a des cas d’AVC nombreux. Un élevage de lapins a fait faillite, juste à côté, chez un voisin, ce sont des boucs nains qui sont morts, les boyaux sont descendus à l’extérieur de leur corps. C’est scandaleux ! Il y a des gens qui font faillite, d’autres qui se suicident… C’est pour eux que je me battrai, je ne lâcherai rien. Il faut que les paysans confrontés au même problème sachent qu’ils ne sont pas seuls.

D’autres cas, en Bretagne et en France

À quelques kilomètres plus au Sud, à Querrien, en La Prénessaye, Patrick Le Néchet a lui aussi perdu de nombreuses vaches : 120 en 5 ans. Pour lui également un taux anormalement élevé d’électricité dans le sol a été observé. Pourtant, du côté des services de l’État, rien ne se passe.

Des cas similaires auraient été signalés à proximité de Guingamp où une centaine de vaches ont connu un sort identique. Et on pourrait penser que cela concerne de nombreuses autres régions.

Ainsi en 2017, le journal Le Progrès rapportait les mêmes faits identifiés par un GDS dans le Val de Saône, suite à l’installation d’une zone industrielle. Là-bas également, comportement, rendement et santé des bovins se sont brusquement dégradés, entraînant une forte mortalité dans des élevages. Mais, là-bas, les membres du GDS semblent être au courant des problématiques liant l’électricité et les sols, une information qui semble faire défaut aux autorités costarmoricaines, à moins que…

Pressions des services de l’État ?

Stéphane le Béchec a le sentiment que son cas dérange et qu’on aimerait bien qu’il quitte son activité sans faire de vagues :

Alors que je demandais leur aide, la DDPP et la chambre d’agriculture ont fait pression pour que je me taise. Ils ont dit que j’allais perdre mon troupeau si je parlais à la presse ! Maintenant, la question va au-delà, si le lait est impropre à la consommation et si les perturbations qui touchent mes animaux touchent aussi les êtres humains, alors c’est un scandale majeur qui se prépare.

Du côté des services sanitaires, l’Anses (Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) a réalisé des études à la demande du ministère de l’Agriculture qui n’ont pas permis de mettre en évidence des effets majeurs des champs électromagnétiques sur le comportement des animaux d’élevage.

Pour autant l’agence reconnaît que l’impact des courants parasites sur l’état sanitaire des animaux reste mal connu.

Des éleveurs s’organisent

En Sarthe, des victimes des rayonnements électromagnétiques se sont constituées en association et soutiennent des éleveurs de quatre départements différents convaincus d’avoir été touchés par les conséquences de perturbation électromagnétiques notamment dus à la 4G.

Plainte sans suite

Stéphane Le Béchec a déposé plainte en avril 2018, pour négligence, mise en danger, empoisonnement volontaire ou involontaire. Toutefois cette plainte n’a pas abouti, le dossier semblant devoir relever de la justice civile.

En attendant, ses bêtes continuent de mourir et l’éleveur a l’intention de dénoncer la vente de sa ferme. Cette affaire ne saurait en rester là ; les questions soulevées sont trop graves, elles appellent des réponses.

Oussama Sbaï


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