
Me Randall Schwerdorffer avant l’audience, discutant avec des consœurs au palais de Justice de Lons-le-Saunier, lundi 25 mars 2019.
Dans le langage fleuri du « milieu » d’antan, les avocats étaient surnomés les « bavards ». Et c’est justement pour avoir un peu trop bavardé aux yeux de la justice que Me Randall Schwerdorffer, le médiatique avocat de Jonathann Daval, était poursuivi ce lundi 25 mars 2019 pour violation du secret de l’instruction.
Ne pouvant être jugée à Besançon, l’affaire a été renvoyée devant le Tribunal correctionnel de Lons-le-Saunier (Jura). L’avocat de Jonathann Daval est poursuivi pour des faits qui se seraient déroulés le 7 décembre 2018 dans l’après-midi, lorsque Me Randall Schwerdorffer a été vu aux côtés de la mère de Jonathann Daval. Il aurait échangé avec elle dans la cour du palais de justice sur « l‘état émotionnel » de son fils au cours d’une confrontation avec son ex-belle mère dans le cabinet du juge d’instruction.
Une affaire très médiatique
L’affaire Daval est, depuis son départ, une affaire très « médiatique ». Le supplice d’Alexia, la jeune femme de 27 ans retrouvée assassinée et partiellement brûlée le 30 octobre 2017 dans un bois à Gray, en Haute-Saône, passionne en effet les médias locaux et nationaux. Et après avoir été un veuf éploré pendant près de trois mois, voilà que Jonathann Daval avoue le meurtre de son épouse. Puis, dans une nouvelle version des faits, qu’il incrimine sa belle famille, évoquant un « complot familial » pour se débarrasser d’Alexia…
Pris dans ce tourbillon, l’avocat de Jonathann Daval avait déjà créé la surprise, en annonçant lui-même en direct à la télévision les aveux de son client, grillant au passage la priorité à la Procureure de la République. L’épisode du 7 décembre a alors été, pour le parquet de Besançon comme pour les parties civiles, la goutte d’eau qui a fait déborder le vase.
« Devoir d’humanité… », répond l’avocat
« Je ne vois pas ce qui m‘interdisait de parler à Martine Henry » explique de son côté l’avocat, niant formellement avoir communiqué à des journalistes présents à ce moment-là des éléments de la confrontation familiale couverts par le secret de l’instruction.
Il estime donc n’avoir pas violé le secret de l’instruction, mais tout simplement avoir été humain en échangeant quelques phrases avec la mère de son client.
Les avocats peuvent-ils s’affranchir du secret de l’instruction ? Jusqu’à quelle limite ? Cette question sera certainement au centre des débats. Sur le papier, Me Schwerdorffer encourt une peine d’un an de prison et une amende de 15 000 euros. Car rendre public des éléments tirés de la procédure est une prérogative du parquet, dit code de procédure pénale.
Au Palais de justice de Lons-le-Saunier, l’examen de l’affaire n’a pas duré cinq minutes. Car d’entrée de jeu, la défense de Me Schwerdorffer a demandé le report de l’audience, estimant n’avoir pas eu le temps de préparer sérieusement la défense de l’intéressé avec un dossier arrivé le 19 mars, pour un procès prévu le 25. Mais surtout, en présence de confrères venus des barreaux de Lons, de Besançon et de Dijon, Me Euvrad a demandé la délocalisation du dossier hors du ressort de la Cour d’appel de Besançon. Une demande jugée « légitime » par le Procureur de la République de Lons-le-Saunier, Jean-Luc Lennon.
En attendant que le procureur général statue sur la demande de délocalisation du dossier, l’audience a été renvoyée au 6 mai 2019.
Il est à noter que les parents d’Alexia Daval, qui estiment que tout ce qui touche à l’affaire Alexia les concerne, étaient présents à l’audience du tribunal correctionnel de Lons-le-Saunier.