« Chaque année, plus de 100 000 jeunes sortent du système de formation initiale sans le moindre diplôme ! », déplorent Ernesto Vidal et Valérie Deleort, professeurs respectivement de mathématiques et de sciences et techniques médico-sociales au lycée Camille-Pissarro. Pour lutter contre le décrochage scolaire, véritable fléau constaté un peu partout en France, l’équipe pédagogique de l’établissement pontoisien a permis à onze de ses lycéens, soit déscolarisés, soit en plein décrochage scolaire, de participer à une semaine en « immersion théâtre », encadrée par Matt K’Danet et ses artistes professionnels de la compagnie Zigzag et par Ludmilla Mennaï, intervenante psychothérapeute. Trois élèves du club de théâtre les accompagnaient également.
Semaine parenthèse
Ce dispositif, nommé La Semaine parenthèse, « bouscule véritablement les pratiques habituelles, puisque les élèves manquent effectivement cinq jours de cours… Mais qui sait ce qu’ils auraient fait si nous n’avions pas su attirer leur attention ? C’est justement le problème avec les décrocheurs : ils sont imprévisibles », analyse Valérie Deleort. Financé par la Région île-de-France, le projet a su séduire le proviseur Jean-Paul Jouan, ainsi que L’, Théâtre des Louvrais, également partenaire.
Remobiliser les élèves
« Il s’agit d’essayer de remobiliser les ressources internes des élèves repérés lors des derniers conseils de classe, pour leur donner envie de se fixer des objectifs et de s’y accrocher », précise Ernesto Vidal. « Ce qui m’a choquée, c’est la détresse de ces élèves et parfois de leurs familles, qui n’ont, pour diverses raisons, plus le moindre espoir en l’administration », ajoute Valérie Deleort. Avec Matt K’Danet, les jeunes ont pu « travailler sur la parole ordonnée, puis désordonnée », mais aussi réaliser des vidéos burlesques d’une vingtaine de minutes, ou encore jouer des saynètes de mise en situation variées. Et visiblement, cela fonctionne. Mady, élève de première, admet avoir « songé à arrêter les études, à plusieurs reprises », mais il se sent à nouveau d’attaque. « J’ai surtout réfléchi en me demandant ce que j’allais bien pouvoir faire après. Étant donné que je veux être avocat ou juriste, je dois aller à la fac, et pour cela il me faut mes diplômes. Je ne vais donc rien lâcher », confie-t-il. Si elle ne fait pas encore l’unanimité du corps enseignant, La Semaine parenthèse aura au moins suscité une vocation et permis au barreau de Pontoise de compter sur une potentielle recrue.
Joseph CANU
